Pour devenir le premier Français en finale depuis vingt-sept ans, Jo-Wilfried Tsonga va devoir à nouveau sortir le grand jeu cet après-midi face au redoutable Stan Wawrinka.
Lionel Chami | 05 Juin 2015, 08h12 | MAJ : 05 Juin 2015, 08h18
Il ne faudra pas s’éterniser au déjeuner car un morceau de choix sera servi en hors-d’oeuvre, dès 13 heures (à suivre sur France 2 et Eurosport), sur le court Philippe-Chatrier : la demi-finale des cogneurs entre Jo-Wilfried Tsonga (1,88 m, 91 kg) et Stan Wawrinka (1,83 m, 81 kg).
Un match de boxe indécis dont Guy Forget, ancien capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis et membre du comité de pilotage du tournoi, nous a aidé à décrypter les données.
Le niveau de jeu
« L’UN ET L’AUTRE sont proches de leur meilleur niveau sur terre battue, juge Forget. Cela laisse présager des points spectaculaires. » Côté Tsonga, le service tourne à plein régime. Des quatre demi-finalistes, c’est le Français qui a servi le plus d’aces jusqu’ici, 43 contre 38 pour Wawrinka. C’est également lui qui a servi le plus vite, 226 km/h, contre 219 km/h pour Wawrinka. Les coups d’attaque du Manceau, le coup droit notamment, sont bien huilés. Mais côté suisse, la palette de coups est encore plus large. « Tous deux aiment faire le jeu, jouer en percussion, imposer leur présence physique, reprend Forget. On a vu Roger (Federer) dominé par la puissance de Wawrinka qui l’a empêché de mettre son jeu varié en place. Quant à Jo, contre Nishikori au 5 e set mardi, il lui en a mis plein la figure. »
La confiance
« NI JO NI STAN ne sont arrivés avec une confiance énorme », souligne Forget. En effet, Wawrinka s’est présenté à Paris avec un bilan sur terre battue de 6 victoires pour 4 défaites. Seule performance notable : un succès sur Nadal en quart à Rome. Le bulletin de Tsonga était seulement passable : 3 victoires pour 3 défaites. C’est sur place que les deux joueurs ont fait le plein. « Jo a enquillé le n° 4 (Berdych) et le n° 5 mondial (Nishikori) et ça ne peut que booster sa confiance, dit Forget. A mes yeux, son match référence ici reste cette défaite en quart face à Djokovic en 2012 (NDLR : défaite en cinq sets malgré deux balles de match). Je ne pensais pas qu’il puisse jouer aussi bien sur terre. Quant à Stan, il vient de battre Federer qui reste le meilleur joueur sur terre battue après Nadal depuis huit ans, devant Djokovic. »
Les ressources physiques
TSONGA est un poids lourd préparé pour un Championnat du monde. Wawrinka n’est pas surnommé Stanimal pour rien. Un peu plus sollicité, le Français a passé 12 h 24 sur le court. Avec un seul set perdu face à Lajovic au 2 e tour, Wawrinka a joué 11 h 2. « Je ne pense pas que cet aspect soit déterminant, dit Forget. Stan a gagné vite. Jo a eu deux jours pour récupérer et c’est assez pour un type aussi bien préparé. Ça fait longtemps que je ne l’ai pas vu aussi affûté. »
Les paramètres extérieurs
LE BEAU TEMPS et la chaleur (32 degrés annoncés) auront pour conséquence d’accélérer les conditions de jeu mais sans grandes conséquences sur cette partie, selon Forget : « Si Jo jouait contre David Ferrer, ce serait un avantage. Mais comme nous ne sommes pas en présence de pousseurs de balle, ça va s’équilibrer. » En matière de programmation, Tsonga a souhaité que son match précède l’autre demi-finale entre Djokovic et Murray. Le Britannique avait d’ailleurs émis le voeu de jouer en second. Pour bénéficier du soutien des spectateurs, le Manceau a pris l’option opposée à celle de 2013, année où il avait raté son entame sur un Chatrier quasi désert et sa demie perdue face à Ferrer (NDLR : 6-1, 7-6 (7/3), 6-2). « C’est une manière de se chercher des excuses, objecte Forget. C’était davantage lié à une erreur dans l’approche qu’au public clairsemé au début de la rencontre. Jo est là pour régler un compte avec Stan Wawrinka, qu’il y ait 15 000 spectateurs ou qu’il y en ait zéro. Cela étant, grâce à cet épisode de 2013, Jo est mieux armé aujourd’hui. »
Les antécédents
TOUS DEUX 30 ANS, les deux hommes se suivent de très près. A Roland-Garros, sur deux confrontations, ils comptent une victoire chacun, à chaque fois en cinq sets — Wawrinka en 2011, Tsonga en 2012. Le Suisse, vainqueur à Melbourne en 2014, et le Français, finaliste en Australie en 2008, sont chacun en quête d’une deuxième finale en Grand Chelem. Une aimable rivalité s’est installée doucement entre les deux garçons, Tsonga s’estimant aussi légitime à un titre en Grand Chelem que Wawrinka lors de son triomphe aux antipodes. L’attitude un peu arrogante du joueur helvète après le succès de la Suisse en finale de la Coupe Davis à Lille en novembre a ajouté à la situation. « Cela fait trois ans que Stan a franchi un cap, souligne toutefois Forget. Il s’est qualifié pour le Masters en 2013 et 2014, il a fait des matchs références, battu Djokovic à l’Open d’Australie, gagné Monte-Carlo. Je ne le vois pas se trouer, faire un non-match. Mais Jo joue trop bien en ce moment pour passer à côté de sa demi-finale. »