Renault va-t-il devenir le principal dommage collatéral de l’affaire Volkswagen ? C’est en tout cas la tournure que semble prendre l’opération de transparence engagée par le ministère français de l’Environnement au lendemain de l’éclatement de l’affaire des moteurs truqués.
Dans son édition de mardi, le Financial Times révèle que la commission dite Royal, du nom de la ministre à l’initiative de ce dispositif de vérifications des motorisations diesel, aurait délibérément occulté certains aspects des tests à des modèles estampillés Renault, notamment le Captur, l’un des plus gros succès commerciaux du groupe de ces trois dernières années.
Le Captur en ligne de mire
Le journal financier s’appuie sur les témoignages de trois membres de cette commission qui ont gardé l’anonymat. D’après eux, le rapport final présenté au mois de juillet n’aurait pas révélé toutes les informations découvertes lors des tests de voitures Renault. C’est notamment le système de dépollution du Captur qui poserait problème.
Les soupçons sont potentiellement explosifs. D’après leFinancial Times, le système de dépollution du Captur de Renault ne fonctionne qu’en situation de test… Interrogé par l’AFP, un porte-parole de Renault s’est voulu très clair : „nos véhicules ne sont pas équipés de logiciels truqueurs”, ajoutant que „le groupe a pleinement coopéré avec la commission en fournissant toutes les explications techniques qui ont été demandées”.
Les associations environnementales ne sont pas pour autant convaincues. Selon certaines d’entre elles, Renault pourrait avoir bridé le fonctionnement du Nox Trap à certaines températures. „Qu’est ce qui peut empêcher ce système de dépollution de fonctionner si ce n’est un logiciel ?”, lâche une association. Autrement dit, Renault est accusé de s’être livré à la même manœuvre que Volkswagen, et qui devrait lui coûter la bagatelle de 15 milliards de dollars d’amendes et réparation aux Etats-Unis.
L’Etat français a-t-il voulu protéger un actif financier?
Pour le journal financier de référence auprès des investisseurs, l’Etat français aurait tenté de protéger les 20% qu’il détient toujours au capital de Renault. D’autant que celui-ci doit procéder à une cession de 5% du capital pour revenir à sa position de 15%. Emmanuel Macron avait décrété que l’Etat ne vendrait pas à n’importe quel prix.
En réalité, la Commission Royal soupçonne l’ensemble des constructeurs de s’être livré à cette pratique, tout en avouant, à demi-mot, les limites de sa compétence technique pour pouvoir le prouver. Et d’affirmer : „à ce stade, la commission n’as pas mis en évidence l’utilisation de dispositifs d’invalidation illégaux mais ne peut en écarter l’hypothèse”. Elle admet par ailleurs ne pas avoir eu accès à tous les logiciels embarqués des voitures testées.
La Commission a donc décidé d’engager des investigations complémentaires en mandatant l’Ifpen, un institut spécialisé dans les énergies nouvelles et les transports. Trois marques seraient dans le collimateur dont Renault, mais également Volkswagen et Fiat.
Une première polémique en janvier dernier
En janvier dernier déjà, la Commission Royal avait mis en exergue un „problème” lié au fonctionnement de l’EGR altérant son efficacité dans le traitement de gaz polluants. Un autre défaut était également décelé sur le Captur. De son côté, la DGCCRF perquisitionnait trois sites du constructeurs, faisant craindre l’éclatement d’une nouvelle affaire de moteurs truqués, suscitant la chute du titre Renault d’environ 22% en Bourse.
Renault avait toutefois admis un dysfonctionnement dans le système de dépollution du Captur mais avait engagé un rappel de 15.000 voitures dès l’automne, c’est-à-dire avant que l’affaire ne soit révélée par la Commission. Dès ce moment, le constructeur confirmait également qu’il abandonnait la technologie du Nox Trap, moins cher mais moins efficace que le SCR.
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Son compatriote, mais néanmoins concurrent, PSA n’avait pas résisté au plaisir de se fendre d’un communiqué pour rappeler qu’il avait fait, très tôt, le choix du SCR. Pour le moment, PSA n’a quasiment pas été inquiété par la Commission Royal…